Lorsqu’on demande à un sage ce qu’est Dieu, il se tait, il répond par le silence, car le silence seul peut exprimer l’essence de la Divinité. Oui, dire ce qu’est Dieu ne suffit pas et dire ce qu’IL est ne suffit pas non plus. Dire que Dieu est Amour, sagesse, puissance, justice… c’est vrai, mais en réalité ces mots passent à côté de la réalité divine, ils ne saisissent rien d e l’infini, de l’éternité, de la perfection de Dieu. On ne connait pas Dieu en parlant ou en écoutant parler de Lui, on Le connait en essayant de pénétrer profondément en soi-même, afin d’atteindre cette région qui est justement le silence.
L’être humain possède des centres subtils appelés dans la tradition hindoue : chakras, lotus, grâce auxquels il a la possibilité de rentrer en relation avec le monde spirituel. Mais ces centres ne peuvent pas s’éveiller et fonctionner au milieu des agitations et du vacarme de la vie quotidienne. Alors pour échapper aux sollicitations et aux agressions du monde extérieur, certains être se sont retirés dans le désert ou les forêts.
Ce sont les ermites, les anachorètes, les saddhous, etc. Parmi eux, il en est qui sont allés encore plus loin et qui ont voulu couper presque toutes relations avec le monde extérieur, ne plus avoir recours aux cinq sens, les mettre hors d’état de fonctionner : ils ont creusé dans la terre des trous juste assez grands pour s’y introduire et c’est là qu’ils se sont réfugiés.
Grâce au sommeil des cinq sens, ces êtres ont réussi à créer en eux le silence absolu ; n’ayant plus rien à voir, à entendre, à sentir, à goûter ou à toucher, ils ont réussi à percer cette paroi opaque qui sépare l’homme de la véritable réalité.
Quand j’étais en Inde, j’ai rencontré quelques-uns de ces très rares êtres qui ont fait de telles expériences. Et même si je savais déjà beaucoup de chose avant de les rencontrer, ils m’ont encore beaucoup appris sur la puissance du véritable silence qui est seul capable de faire vibrer et de mettre en marche tous nos centres spirituels.
Car le véritable silence n’est pas uniquement absence de bruit. Le véritable silence est au-dessus de la sagesse, au dessus de la musique, c’est le monde le plus lumineux, le plus puissant, le plus beau, le centre d’où jaillissent toutes les créations. Ce silence est Dieu Lui-même. Il faut se lier à lui souvent, se plonger en lui en s’efforçant même d’arrêter la pensée.Dans ce silence, une paix extraordinaire s’installe en vous, et il se peut même alors que Dieu vous parle. Car c’est seulement au sein du silence et de la paix que Dieu accepte de parler.
Entrer dans le silence est donc une activité qui se situe au-delà des cinq sens, au-delà du sentiment et même de la pensée. Lorsqu’on atteint cette région du silence, on nage dans un océan de lumière, on vit la vraie vie, intense, abondante.
Cette expérience du silence, certaines personnes l’ont faite parfois après de grands bouleversements, de grandes souffrances, de pertes cruelles. Comme si le choc reçu les avait projetées au-delà d’elles – mêmes, là ou veille cette entité que la Science initiatique a appelé justement « le Silencieux ».Mais la réalité c’est que, même s’ils ont fait de telles expériences, la majorité des humains vivent la plupart du temps à la périphérie de leur être. Pour eux, la vie intérieure se limite au domaine du cœur et de l’intellect, c’est-à-dire au plan astral et mental. Et là évidemment, ça bouge ! Les désirs, les sensations, les passions, les chagrins, les projets, les calculs, il y a de quoi voir, entendre et s’occuper. Mais profondément toute cette ébullition ne change rien, l’homme ne se transforme pas.
Pour changer en profondeur, pour trouver quelque chose d’essentiel, il ne faut pas en rester là, il faut s’élever jusqu’aux plans causal, bouddhique et atmique. Des pensées et des sentiments ordinaires, tout le monde en a. Il n’y a pas besoin de faire des efforts pour cela, on n’a qu’à se laisser aller. Mais pour nourrir des sentiments inspirés par l’amour divin, des pensées inspirées par la sagesse divine, pour vivre des états de conscience supérieurs, il faut faire des efforts. Ces efforts sont le désintéressement, le détachement, le renoncement… Ce n’est qu’à ces conditions qu’on pénètre dans la région du silence.
Certains diront : « Mais ce silence dont vous nous parlez, ces mondes au-delà des pensées et des sentiments, c’est le vide, c’est comme si vous nous demandiez de nous jeter dans le vide… c’est effrayant ! »D’une certaine façon, oui, on peut appeler cela le vide, mais n’ayez pas peur, je n’ai jamais dit qu’il fallait s’y jeter comme ça, sans y être prêt. Pourquoi serais-je plus insensé ou plus cruel qu’une mère oiseau ? Que fait une mère oiseau ? Elle garde ses petits nouveau-nés tout le temps qu’il faut dans le nid, puis quand elle sent qu’ils sont prêts, que leurs ailes sont suffisamment développées, elle les pousse hors du nid ; mais pas avant. Eh bien moi non plus, je ne vous pousse pas dans le vide avant que vous ne soyez prêts. Je vous présente seulement à l’avance le travail à faire et les moyens de le faire, c’est tout.
D’ailleurs, le vide n’est pas un but en soi. Faire le vide, c’est apprendre à se débarrasser de tous les éléments étrangers qui nous empêchent d’entrer en contact avec le monde divin et de recevoir ses bénédictions.
Combien de gens sont comme des bouteilles pleines ! Pas moyen de verser quoi que ce soit en eux, c’est plein : plein de désirs malsains, d’idées erronées, de partis pris ; ils ne pensent jamais à se vider pour remplacer l’obscurité par la lumière, la laideur par la beauté, le désordre par l’ordre.
Quand il s’agit de remplacer un ouvrier, un patron, une femme, un mari, là oui, ce sont des as. Mais si on leur parle de remplacer l’erreur par la vérité, un défaut par une qualité, ils vous regardent étonnés.
Donc c’est vrai, faire le silence, c’est en quelque sorte faire le vide en soi et c’est dans ce vide que l’on reçoit la plénitude. Oui, car en réalité le vide n’existe pas. Enlevez l’eau d’un récipient, il y entre l’air, enlevez l’air, il y entre l’éther…Quand on essaie de faire le vide, la matière est à chaque fois remplacée par une matière plus subtile. De la même façon, quand on arrive à rejeter les pensées, les sentiments et les désirs inférieurs, c’est la lumière de l’esprit qui fait irruption : à ce moment là on voit, on sait.
Le silence est la région la plus élevée de notre âme, et au moment où nous atteignons cette région, nous entrons dans la lumière cosmique. La lumière est la quintessence de l’univers, tout ce que nous voyons autour de nous et même ce que nous ne voyons pas, est traversé et imprégné de lumière. Et le but du silence, justement, c’est la fusion avec cette lumière qui est vivante, qui est puissante et qui pénètre toute la création.
Si vous le pouvez, essayez d’avoir dans votre appartement une pièce, aussi petite soit-elle, que vous réserverez justement au silence, une pièce avec de belles couleurs, décorées de quelques tableaux symboliques ou mystiques. Consacrez-là au Père céleste, à la Mère divine, au Saint-Esprit, aux anges et aux archanges, n’y laissez entrer personne et n’y entrez vous-même que si vous êtes capable de faire le silence en vous afin d’entendre les voix du Ciel. Vous donnerez ainsi à votre esprit, à votre âme, les possibilités de s’épanouir et d’appeler des bénédictions que vous pourrez répandre ensuite sur toutes les créatures autour de vous.
Si vous savez garder vraiment la bonne attitude, il émanera des murs, des objets de cette pièce, quelque chose d’harmonieux qui attirera les entités lumineuses, car ces entités se nourrissent d’harmonie. Et lorsqu’il vous arrivera d’être triste, découragé, si vous entrez dans cette chambre, comme elle est peuplée de bons amis qui ne demandent qu’à vous consoler et à vous aider, au bout d’un moment vous vous sentirez tout à fait rétabli.
Mais au fur et à mesure que vous préparerez cette chambre du silence, soyez conscient que vous la préparez aussi en vous, dans votre âme, dans votre cœur. Et alors partout où vous vous trouverez même au milieu des tumultes, vous pourrez entrer dans cette chambre intérieure pour y trouver la paix et la lumière.
Nous vivons en même temps dans les deux mondes : visible et invisible, matériel et spirituel, c’est pourquoi il est bon d’avoir cette chambre du silence à la foi en soi et en dehors de soi, et de la tenir à l’abri des influences maléfiques.
Je sais bien que ce que je vous dis là n’est pas pour tout le monde, mais seulement pour ceux qui, malgré tout ce qu’ils ont obtenu de la vie, ne sont pas satisfais : ils sentent qu’il leur manque quelque chose d’essentiel. Alors, c’est à vous de voir….Mais une fois que vous aurez pris la décision de vous engager dans cette voie du silence, ne vous inquiétez pas du temps qu’il vous faudra pour la parcourir.
L’essentiel, c’est votre décision d’entrer dans cette voie et de persévérer.
Omraam Mikhaël Aïvanhov